Une question se pose concernant les recours que disposent le bénéficiaire en cas de violation du pacte de préférence notamment lorsque le promettant vend son bien à un tiers avant d’avoir purge le pacte de préférence. La solution est différente selon que le tiers est de bonne ou mauvaise foi, si le tiers est de bonne foi la vente conclue au mépris du pacte de préférence n’entrainera pas la nullité de la vente, le bénéficiaire disposera seulement d’une action en responsabilité contractuelle contre le promettant sur le fondement de l’article 1142 du Code civil. En revanche si le tiers est de mauvaise foi, la vente conclue en fraude des droits du bénéficiaire pet être annulée, cependant la cour de cassation a une conception restrictive de la mauvaise foi, elle exige deux conditions cumulatives : d’une part il va falloir prouver que le tiers était informé de l’existence du pacte de préférence, généralement la publicité du pacte constitue une présomption de la connaissance de l’existence du tiers de l’existence du pacte, d’où l’intérêt en pratique de procéder à la publicité de celui-ci même si le décret de 55 prévoit que cette publicité est facultative, et d’autre part il faut prouver pour le bénéficiaire que le tiers était informé de la volonté de se prévaloir de ce pacte, ici la publicité du pacte ne sera d’aucun secours pour le bénéficiaire, en effet d’après un arrêt de la cour de cassation du 16 mars 1994 le pacte de préférence publié ne suffit pas en lui-même de constituer la mauvaise foi du tiers puisqu’il ne dit rien sur la volonté du bénéficiaire de s’en prévaloir, cette deuxième condition exigée par la cour de cassation semble porter atteinte à l’efficacité du pacte car le bénéficiaire aura toutes les difficultés de prouver que le tiers était informé de la volonté de s’en prévaloir, par ailleurs il convient d’observer que la nullité de la vente consentie en fraude du pacte de préférence ne semble pas la sanction la plus efficace pour réparer le préjudice subi par le bénéficiaire. Dans ces conditions ne peut-on pas admettre un droit de substitution du bénéficiaire dans les droits du tiers, cette sanction serait la plus efficace pour préserver les droits du bénéficiaire que la nullité, la cour de cassation l’a reconnu dans un arrêt de la chambre mixte du 26 mai 2006 : si le bénéficiaire d’un pacte de préférence est en droit d’exiger l’annulation du contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d’obtenir sa substitution à l’acquéreur c’est à la condition que ce tiers ait eu connaissance lorsqu’il a contracté de l’existence du pacte de préférence et de l’intention du bénéficiaire de s’en prévaloir. Le pacte de préférence est ainsi assez fragilisé, c’est l’exécution forcée du contrat. Le notaire, rédacteur de l’acte, devrait insérer une clause pénale élevée pour forcer le promettant à respecter les droits du bénéficiaire.
Le projet de réforme prévoit que si le promettant vend son bien à un tiers de mauvaise foi le bénéficiaire dispose d’un droit de nullité de la vente au mépris de ses droits, le projet de réforme ne parle pas de substitution mais préfère laisser au juge la possibilité de se prononcer au cas par cas sur un droit de substitution du bénéficiaire aux droits du tiers (article 35 al2 du projet), donc il y a un intérêt d’insérer une clause de substitution dans le contrat. Le projet ne donne aucune définition du tiers de mauvaise foi, on peut penser qu’il sera celui qui avait connaissance du pacte de préférence, la deuxième condition de la mauvaise foi est exclue, d’ailleurs l’alinéa 3 prévoit que lorsque le tiers présume l’existence d’un pacte de préférence il peut mettre en demeure son bénéficiaire d’avoir à confirmer son existence dans un délai raisonnable (renversement de la charge de la preuve, procédure interrogatoire du tiers). La mise en demeure mentionne en terme apparent qu’à défaut de réponse le bénéficiaire du pacte ne pourra plus se prévaloir de la nullité du contrat à son égard.